Pierre-François Lebrun est un réalisateur de reportages pour la société de production Aligal. Il a réalisé un documentaire sur l'affaire Seznec pour le compte de France 3 : "Seznec, la fabrique de l'affaire du siècle" qui reprend les thèses très contestables de Michel Pierre. Ce dernier a publié un livre en 2019, "L'impossible innocence" surfant sur l'emballement médiatique de 2018 et des fouilles à Morlaix dont j'avais été le coordinateur d'une équipe de bénévoles. Dans son livre, il a fait quelques recherches succinctes notamment sur l'affaire des Cadillac. Il n'a malheureusement rien trouvé. Il conclut que la justice a bien fait son travail et que le reste n'est qu'une folie médiatique.
Le sujet du livre de Michel Pierre est l'histoire de l'affaire Seznec et non l'affaire elle-même. Il pose par principe que Seznec est coupable. Il doit être absolument coupable pour développer sa thèse de la folie médiatique sinon le livre est sans objet. Pour un historien, poser des principes invérifiables et indémontrables relève de la fourberie.
Pourtant, avant d'arriver à ses conclusions définitives, Michel Pierre, page 36 de son livre se pose une question fondamentale : "La véritable question à ce stade est de
comprendre comment les deux hommes ont pu se convaincre l'un l'autre
d'un possible et juteux marché de rachats de Cadillac destinées à
l'URSS. Comment cette idée farfelue a-t-elle pu s'insinuer dans l'esprit
d'hommes..."
Michel Pierre ne comprend pas l'affaire Seznec. Comme tout individu devant un mystère qui lui échappe, il préfère retourner à des explications simples, voire simplistes même s'il sent au fond de lui-même que ça ne va pas, qu'il y a un truc qui cloche.
A cette époque, j'avais déjà des réponses partielles à ces questions. J'avais découvert qu'il y avait bien eu une affaire de Cadillac vers la Russie des Soviets. Je n'avais pas le temps, ni l'envie de pousser plus loin mes recherches. Avec Michel Pierre, des milieux de gauche qui avaient sympathisé aux campagnes pour l'innocence avaient subitement changé d'opinion et maintenant devenaient anti-seznec. Entre-temps, Denis Le Her-Seznec, à la demande de l'avocat Gilbert Collard avait participé à un meeting du RN de Marine Le Pen. De chouchou des médias, il était devenu infréquentable.
Finalement, j'avais décidé de m'atteler à la tâche et de résoudre la mystérieuse affaire Seznec. Cela m'a entrainé au-delà de mes espérances en retrouvant qui était l'américain Chardy, intermédiaire dans le marché de Cadillac. J'avais retrouvé l'Américain en prouvant qu'il était bien celui dont les détails sont contenus dans le dossier d'instruction archivé à Quimper. J'avais décidé de publier un nouveau livre, Affaire Seznec : Les archives du FBI ont parlé dont la version définitive date de 2023. J'imaginais le bonheur de Michel Pierre apprenant la réponse à sa véritable question. Jusque-là, nous avions des échanges cordiaux mais il est devenu progressivement hostile. Je lui ai demandé de démontrer que j'avais tort mais il en était bien incapable, répondant avec des sarcasmes. Je me suis rendu compte qu'il n'avait pas une démarche scientifique mais idéologique. Il fonctionnait avec des croyances et des certitudes figées.
Maintenant que penser du documentaire que je n'ai pas vu de Pierre-François Lebrun ? Si ce documentaire reprend les thèses de Michel Pierre qui fait de l'histoire comme Monsieur Jourdain fait de la prose, je pense que nous n'apprendrons rien. Perso, un nouveau documentaire sur l'affaire Seznec est toujours bon à prendre. A défaut d'avancer, cela fait toujours vendre quelques livres supplémentaires.
Pierre-François Lebrun n'est pas expert de l'affaire Seznec donc il est facile à embobiner. Pour monter en compétence, il a toutefois posé sur sa table de travail, outre le livre de Michel Pierre, celui de Jaffré qui date un peu et celui de Denis Langlois. On peut supposer qu'il ait un peu farfouillé l'internet avec google et qu'il ait écouté la bande son de l'émission d'Europe 1 de 1979 sauvée par Langellier sur des cassettes. Concernant cette dernière émission, je me suis toujours demandé si Turrou avait contacté la radio pour laisser un indice caché qui serait passé inaperçu. Denis Le Her Seznec qui avait participé à l'émission m'a indiqué qu'il n'avait pas un tel souvenir. Turrou est mort en 1986, enterré au cimetière de Neuilly/Seine.
Sur sa page Facebook, PF Lebrun montre un écran où il enregistre et monte son documentaire. Il y a encore une vue de Michel Pierre qui décidément semble être le personnage central. Je lui ai laissé un petit commentaire :
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